La gravité de l’interface (1/2)

Film 3D d’envergure

Oui, enfin, je suis allé voir le film Gravity de Alfonso Cuaron. Et oui j’ai adoré ce film où la 3D prend toute la dimension qui est sienne, enfin un film 3D fantastique ! Un très bon moment de cinéma, c’est clair.

Pour cet article, je ne parlerai pas de la prestation de Georges Clooney, ni même de celle de Sandra Bullock.

Je parlerai d’une réflexion que j’ai pu avoir le lendemain, une fois que l’effet d’espace sidéral s’est dissipé.

En effet, ce qui a pu me frapper -entre autres- dans ce film, est cette présence constante de la machine, en tant qu’appareillage de sortie, de mesureur de temps, de distance, d’oxygène, en tant qu’outil, en tant que transporteur… Pendant presque la totalité du film, l’action est attachée à une machine. Bon, évidemment, une sortie en espace ne s’improvise pas, elle nécessite quelques équipements….

Homme encordé à la machine

Le personnage principal se retrouve seul face à la machine. Et cette solitude-teintée de désarroi-accentue le rapport homme / machine. Quel est-il ? Comment ce rapport s’exprime-t-il ? Par l’interface.

Ce qui nous raccorde à la machine est l’interface (noter le jeu de mot circonstancié au film -corde…). C’est par cette interface que nous communiquons, parfois avec émerveillement et parfois avec perplexité, colère. La relation est établie à partir du premier bouton, des inscriptions du tableau de bord, du premier numéro digital qui s’affiche.

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Cockpit de la navette américaine Endeavour (en service de 1992 à 2011)

Et j’ai trouvé que ce film était un beau manifeste de ce rapport homme / machine. Il y a cette petite empathie avec le personnage principal, pas très initié aux ingénieries spationautes, qui nous donne à appréhender la machine de manière directe in sitù.  Il y a l’évidence du contexte, bien sûr, la nécessité du matériel qui nous accompagne à chaque mouvement, dans chaque action pour pallier à notre incapacité à vivre dans l’espace. Une multitude de matériel est greffée sur la combinaison, par exemple. A voir, ce que porte « Ryan » à l’avant-bras, une montre et une tablette, les indications visuelles qui se projettent sur le globe du casque. On peut penser aux montres qui sortent ces derniers temps, les Google Glasses…

Le quotidien technologique

Notre futur n’est-il pas promis à des circonstances de plus en plus similaires ? Même, sans partir sur un « avenir à la star trek », nous composons de plus en plus un quotidien riche en technologie. Celle-ci, indéniablement, interviendra de plus en plus pour pallier, compléter, enrichir nos capacités, nos manques, et démultiplier nos tâches du quotidien (en délégation). Aussi, est-il question de penser l’interface comme premier élément déterminant pour ce type de quotidien. Appréhender l’interface positivement est la première condition pour arrêter de craindre la machine comme « mangeuse d’humanité » ou bien comme menace dans le spectre de Hal. L’interface doit être « quotidiennement » intégrée dans nos styles de vie, nos attitudes et convenir à nos exigences conscientes et même inconscientes : en faciliter l’utilisation de manière intuitive.

La machine intuitive ?

En tant que designer, nous avons à réfléchir, penser l’interface de manière intuitive pour approcher au plus près des comportements humains conscients et inconscients, et y répondre. C’est toute la mission du design UX : se concentrer sur celui qui utilise et sur l’usage, la conception tournée vers l’expérience utilisateur.

Dans Gravity, à chaque passage d’une station ou capsule, on se retrouve dans un aménagement différent, où la langue change, les manuels changent, les tableaux de bord changent… Cela questionne sur la compréhension universelle et pose le problème de l’universalité des usages, de l’universalité du comportement face à un mur de boutons et de jauges.

Ce qui est très intéressant est ce passage dans les différents aménagements, où on est confronté, avec le personnage, à différents environnements d’interface. Passant de la navette Explorer, à la station spatiale internationale ISS aux capsules Soyouz et Shenzhou, nous parcourons l’ensemble des aménagements et constatons les différences pour chacune.

La machine ne devrait-elle pas être si simplement lisible qu’elle pourrait acquérir une forme d’universalité ? Et la machine doit s’adapter à notre langage, et non le contraire. Dans la mesure où nous avons besoin de la machine, nous créons la machine pour nous, pour nous servir. Mais nous avons aussi besoin de créer le langage d’interprétation entre nous et cette machine froide, rigoureusement logique et implacable. Alors vers quel type de langage compréhensible allons-nous tendre pour rendre le rapport à la machine plus simple, plus intuitif, plus engageant ? C’est le design qui donnera la réponse. Plus que jamais la forme est importante dans ce type de rapport.

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Tableau de bord Emirai de Mitsubishi

La machine sensible

Nous pouvons constater dans les innovations d’interface objets (tableaux de bord des voitures par exemple) est la tendance au lissage, simplicité de forme et de volume. Le flat design est dans cette mouvance. Où la forme serait fluide, réduite à sa forme la plus simple, organique, presque comme la continuité de nos gestes, de nos organes. Avec le tactile, les boutons se font sensibles. Le contact physique est une donnée importante qui entre en compte dans la conception.

Le design, de par les solutions qu’il apporte, est le meilleur moyen de donner à l’utilisateur une expérience souple, agréable, compréhensive et engageante de la machine en rendant accessible toutes les fonctionnalités de celle-ci. Il est incompressible et indispensable dans le développement de chaque élément à produire.

 

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  • 09/11/2013
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